Tome IV
Toute sa vie, Fontenelle fut un auteur de théâtre. Dans ce volume figurent les pièces qu'il écrivit avant son entrée à l'Académie des Sciences. D'abord deux opéras signés par Thomas Corneille, mais versifiés par son neveu, Psyché (1678) et Bellérophon (1679); Lully fit la musique, et le second de ces opéras, destiné à chanter la paix de Nimègue, eut un éclatant succès. En 1740, Fontenelle eut l'occasion dans une lettre au Journal des Savants, de revenir sur Bellérophon et d'expliquer, contrairement à ce qu'on lisait dans le Boloeana (bons mots, anecdotes de Boileau), qu'il était l'auteur principal, voire unique, du livret. Nous publions cette lettre après le texte des deux opéras. Ils furent suivis d'œuvres moins heureuses; une tragédie, Aspar, créée en décembre 1680, qui subit un tel échec que Fontenelle renonça à la publier et en brûla le manuscrit et une petite comédie, La comète, inspirée par cette comète qui suggéra à Bayle ses Pensées diverses : 9 représentations seulement en janvier 1681. Après la mort de Quinault et de Lully, Fontenelle revint à l'opéra et composa avec Collasse Thétis et Pélée (1689), qui réussit fort bien, et Enée et Lavinie (1690), dont le médiocre succès l'amena à renoncer à ce genre. Il y eut encore trois pastorales, Enone, qui demeura inachevée et paraît remonter aux années 1686-1688, Le retour de Climène et Endimion (1692), et le prologue d'une comédie en vers, Pigmalion, prince de Tyr, qui fut vraisemblablement écrit en 1690-1695. A la même époque, Fontenelle, inspiré par "la Querelle des Anciens et des Modernes", griffonna de fort acerbes Remarques sur quelques comédies d'Aristophane, sur le théâtre grec, etc., qu'il conserva dans ses tiroirs: il voulut, une cinquantaine d'années plus tard, les publier dans l'Encyclopédie, mais Diderot s'effaroucha de tant de hardiesse et refusa ce présent. La philosophie n'est pas absente de ces œuvres galantes ou polémiques. Le scepticisme des Dialogues des Morts s'y retrouve, et, comme dans la Pluralité des Mondes, comme dans tous les écrits de Fontenelle, un certain humanisme rebelle à l'occulte, au sacré, au divin, même si le librettiste de Lully et de Collasse est contraint de recourir à la mythologie.
Pour tous ces textes, nous avons reproduit la version donnée dans la grande édition des Œuvres complètes (1751-1761).
Alain Niderst